De la fin juin à septembre, ExoGlyphes vous propose, à partir de 3 euros par mois de continuer à plonger le genre de l’Horreur Cosmique avec le troisième ouvrage de la série , « Une plaisante terreur ». Et vous comprendrez pourquoi Montague Rhodes James, médiéviste et directeur de la prestigieuse école d’Eton, constitue l’une des 3 influences majeures sur l’oeuvre du Maître de Providence, qui se considérait d’ailleurs comme un humble continuateur…..
On c’est que c’est impossible. Donc on le fait.
Pour rappel, ExoGlyphes est un « canal de traduction » des causes perdues des littératures de l’imaginaire : vos dons (a partir de 3 euros par mois), vont intégralement aux traducteurs et aux auteurs et nous permettent de vous proposer des œuvres de références qui n’arrivent pas a être prises en charge par le marché éditorial: dis continuées, inédites, épuisées.
Depuis 2016, nous avons ainsi traduit Le roman russe le Dernier Anneau, détournant le Seigneur des Anneaux, mais aussi la suite de La Laverie de Charles Stross. Cette année, nous nous attaquons, avant de retrouver Charles Stross, à des classiques injustement négligés de l’Horreur Cosmique, ce genre aux contours cernés par le Maitre de Providence. Le Tome 2 « Les êtres de l’abîme », était consacré aux nouvelles d’A. Merritt. Le tome 3 voit maintenant publier l’intégale des nouvelles de MR. James, une référence des cultures de l’imaginaire restée trop longtemps indisponible.
M.R. James, l’autre écrivain reclus a qui HPL doit beaucoup
En quelques mots, Montague Rhodes James (1862-1936) et l’exemple typique du « scholar » britannique, érudit discret dont les nouvelles n’étaient qu’un hobby. Bien avant qu’Halloween ne popularise sur le continent les « soirées horreur » auprès des teenagers, MR James se fixait comme objectif de terroriser ses étudiants par les lectures nocturnes de ses nouvelles. On imagine aisément l’ambiance…
Malgré sa modestie, son oeuvre est devenue une référence absolue, toujours actuelle, en étant un jalon clef de la formation du fantastique moderne. Or, publiée une unique fois en français en 1990 par les regrettées éditions NEO, juste avant leur disparition, son oeuvre était depuis près de 30 ans redevenue indisponible, vendue à prix d’or sur le marché de l’occasion….voila donc une autre injustice réparée.
Comme vous le verrez, ses « fantômes » ont en effet très peu a voir avec leurs homologues victoriens affublés de leurs sempiternels suaires, et qui auraient pu vous décourager d’aborder l’oeuvre (ce qui a été mon cas). Ils ressemblent plus aux « yokais » japonais pour le coté grotesque et tactile. Mais à la différence de ces derniers, leur intrusion dans d’une réalité prosaïque qu’ils font voler en éclats reste en elle même la source de la terreur.
Vous comprendrez ce que je veux dire si, la nuit, vous avez parfois peur de tirer le rideau d’une fenêtre pour y découvrir ce qui peut se cacher derrière….invariablement rien, bien sur. Mais le malaise ne disparaît jamais.
MR James et l’oeuvre de Lovecraft
S’il était besoin de le rappeler, MR james reste l’une des references de HPL. Comme il le dit lui même dans une lettre de 1934 relevée par ST Joshi,
Je ne prétends pas appartenir au premier rang des écrivains bizarres – un rang représenté par Poe parmi les morts, et par Arthur Machen, Algernon Blackwood, Walter de la Mare, Lord Dunsany, & Montague Rhodes James parmi les vivants.
Vues les critiques souvent adressées à Blackwood et la production peu importante de De la mare, les « Grands Anciens » de HPL sont certainement, dans cet ordre, Dunsany, et ex-aequo, Machen et MR James.
Concrètement, on retrouve sur le fond chez HPL les mêmes personnages que chez James, des « scholars » bibiophiles, qui d’ailleurs vont creuser dans un passé (ou des ouvrages) qu’il vaudrait mieux laisser tranquilles. Sur la forme, l’influence est plus grande encore puisque HPL essaie (s’en jamais, estime-t-il, y parvenir) à retranscrire le climat glaçant de piège et de descente réaliste dans l’horreur; avec cette accélération si particulière qui nous précipite face à « l’obscénité ». Tout cela en ne fournissant aucune explication rationalisation finale, tour de force sur lequel HPL insiste, avec raison, tout particulièrement, comme condition du maintien du malaise.
M. R. James joint l’éclat, la lumière et le banal à l’étrange aussi bien qu’on peut le faire – mais si un autre essayait la même méthode, les chances seraient de dix à un contre lui. L’élément le plus précieux en lui – en tant que modèle – est sa façon de tisser une horreur dans le tissu quotidien de la vie et de l’histoire – en la faisant grandir naturellement hors de la myriade de conditions d’un environnement ordinaire.
Lettre de 1935
Bref, un Maître consommé de l’horreur cosmique, plongeant par reliques interposées dans les abîmes du temps et de l’a-humain. Vous m’en direz des nouvelles.
A noter que nous ne nous sommes pas contentés de les republier : les nouvelles ont été complètement révisées par leur traducteur (celui de la majorité d’entre elles), Xavier Perret, et j’ai voulu aller au delà faisant traduire des histoires inachevées inédites issues des archives de l’auteur, que Jacques Fuentealba a prises en charge, le tout accompagné d’une article de l’auteur sur son art, assez édifiant.